Marie-George THEBIA à Balata : « Un livre peut changer une vie »

Mis à jour le jeudi 28 novembre 2024 , par AnneClaire RENAUDIN

Dans le cadre du 13ème festival du livre international de Guyane (28 au 30 novembre au Zéphyr), des écrivains se déplacent dans les établissements, à la rencontre du jeune public guyanais. Lundi 25 novembre 2024, le lycée accueillait Marie-George THEBIA, auteure de nombreux romans, dont Âmes Tembé paru en 2023, ou encore la trilogie historique pour la jeunesse, qui débute avec Mon nom est Copena en 2019, Aïyana chasseuse de fourmis en 2020 et Saül et les poussières d’or en 2021.

Marie-George Thébia a rencontré une douzaine d’élèves de la classe de 1CAP Carrelage et Mosaïque, accompagnés de leur professeure Madame Vinhas, avec laquelle ils avaient travaillé à un questionnaire et feuilleté les ouvrages de l’auteure au CDI. L’intervention s’inscrit dans un projet annuel, « De l’auteur au lecteur », qui intègrera d’autres rencontres avec des écrivains et professionnels du livre, ainsi qu’une sortie en librairie dans le cadre de l’opération « Jeunes en Librairie ».

D’une question à l’autre, Madame Thébia nous a parlé de son parcours, de ses motivations, aspirations et préoccupations pendant plus d’une heure, sans perdre un instant l’attention des élèves. Il faut dire que notre invitée, en bonne conteuse, a su captiver et conquérir un auditoire qui n’était pas gagné d’avance, par sa parole pétillante et complètement authentique.

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Quelques extraits d’un dialogue à bâtons rompus :

« J’ai commencé à écrire vers l’âge de huit ans. Il faut dire que je lisais énormément… je pense d’ailleurs que quand on lit beaucoup, vient un moment où on a envie d’écrire à son tour. Je fabriquais de petites bandes dessinées, mes frères et sœurs étaient mes premiers lecteurs, et figurez-vous que mon frère s’est mis à vendre mes BD, qui ont vite eu un grand succès dans les cours de récré ! Je me suis dit que mes histoires pouvaient donc intéresser d’autres que moi ! »
(…)
« Vous savez, mon père est guyanais, mais je n’ai découvert la Guyane qu’à quinze ans, et mon rapport à ce pays n’a pas été immédiatement évident. J’ai appris peu à peu à l’aimer et maintenant je me sens vraiment guyanaise. Mais je tiens à revendiquer la totalité de mes origines, pas uniquement les lointaines racines africaines. »
(…)
« Forcément, je suis sensible aux retours des lecteurs sur mes livres, mais pas trop quand même ! Il y a eu un début de polémique autour de Copena, qui raconte les aventures d’un jeune esclave au XVIIIème siècle. On m’a reproché de lui avoir inventé une amitié avec le fils du maître de la plantation, un petit Blanc, donc, qui de plus apprend à lire à Evariste… bon… On m’a reproché aussi d’avoir donné de Maripasoula – où se passe mon dernier roman, Ames Tembé  -, une image très négative… booon ! C’est vrai que j’aborde des sujets qui fâchent, des sujets un peu tabous, mais je veux dire la réalité de la Guyane, ce qu’elle a de merveilleux et d’unique, mais aussi ses drames et les problèmes qui la minent. »
(…)
« Un écrivain n’écrit pas pour devenir riche… heureusement car il devient rarement riche ! Il écrit parce qu’il a des choses à raconter, à dire, à partager. Et puis ici, en Guyane, les écrivains ont une mission particulière, car on sait que la lecture n’est pas une habitude, rares sont les gens qui voient quel peut être l’intérêt de la lecture, et c’est la raison pour laquelle j’aime autant venir rencontrer les élèves, comme aujourd’hui. Voilà, nous avons aussi pour mission de convaincre qu’un livre peut changer une vie… mais oui ! Vous ne me croyez pas ? J’ai plusieurs exemples, mais celui qui m’a le plus marquée remonte aux années où j’animais des ateliers de lecture en prison… c’est là qu’un jeune détenu a lu le premier livre de sa vie, et il prétend qu’à partir de là, il a repris confiance en lui. Je l’ai revu et c’est vrai que son existence a pris un tout autre tour : il est sorti de prison, a trouvé un bon emploi… Et ce qui me rend super heureuse, j’avoue, c’est que ce livre c’est Mon nom est Copena  ! Dont il m’a demandé d’écrire la suite ! »
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« C’est vrai que j’écris principalement sur la Guyane… je pense qu’un écrivain parle d’abord de son environnement proche, c’est assez naturel. Mais dans mes derniers romans, Ames Tembé en particulier, il est aussi question de l’hexagone, dont les problématiques vont croiser celles de Maripasoula… Il me semble que nous, écrivains de Guyane, nous sommes parfois un peu trop centrés sur notre territoire, comme si ce que nous avons à dire ne concernait que nos compatriotes, alors qu’en vérité nous avons des histoires universelles à raconter ! »
(…)

Merci encore à Marie-George Thébia pour cette rencontre passionnante et vivante qui a su toucher nos élèves et, peut-être… leur donner envie de chercher le livre qui changera leur vie !

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Merci à Erwing Farlot pour les photos.

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